L' HISTOIRE DU BELEM Le Belem : un navire qui a vécu pas moins de cinq
vies, changé trois fois de nationalité pour finir par retrouver le
tricolore de ses origines, trompant la mort, survivant là où des
milliers d'autres voiliers, plus grands, plus puissants, plus neufs, ont
disparu à jamais... Un navire qui a suivi sa bonne étoile.
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1896-1914 : L'Antillais de Nantes |
Le 23 décembre 1895, Fernand Crouan, de la maison
Denis Crouan Fils, armateurs à Nantes, commandait à Adolphe Dubigeon,
directeur des chantiers du même nom à Chantenay sur Loire, la
construction d'un trois-mâts barque à coque d'acier. Il s'appellerait
Belem, du nom d'un port du Brésil où les Crouan avaient fondé au début
du XIXème siècle un comptoir commercial. Il allait servir au transport
de marchandises, notamment de cacao pour le compte du célèbre
chocolatier Menier.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Les
ingénieurs de Dubigeon se mirent au travail d'après les spécifications
très détaillées de Fernand Crouan : l'armateur voulait une coque en
acier, des mâts en bois, une longueur à la flottaison de 48m, une
largeur maximale de 8,80m, un creux de 4,90m. Bref, un navire
relativement petit, fin, élégant, rapide mais robuste, qui pouvait
transporter jusqu'à 675 tonnes de chargement. Sa ligne allait valoir au
Belem, dès sa naissance, le surnom, prémonitoire, de « yacht » de
l'armement Crouan.
La maison Crouan avait déjà confié à Dubigeon la
réalisation d'autres trois-mâts du même genre, le Noisiel, le
Claire-Menier et le Denis-Crouan. Comme le Belem, c'étaient des
Antillais, destinés à assurer la liaison entre Nantes, les Antilles et
l'Amérique du Sud.
Le Belem fut construit en moins de 6 mois et lancé
le 10 juin 1896... Il portait un équipage de 13 hommes et battait le
pavillon rouge à étoile blanche de la maison Crouan. Sur sa proue, la
devise « Ordem e progresso » était celle du Brésil.
Des campagnes mouvementées
Dès sa première campagne commerciale, le Belem fut
mis à rude épreuve. Il survécut, au Brésil, à un violent incendie à bord
dans lequel les 115 mules de sa cargaison furent brûlées vives.
Quelques années plus tard, le trois-mâts devait échapper par miracle à
l'éruption de la Montagne Pelée qui dévasta le port de St Pierre de la
Martinique.
Le 8 mai 1902, à 8h du matin, une nuée ardente
allait détruire, en 90 secondes, la ville, ses 30 000 habitants et tous
les navires de la rade. Le Belem, faute de place, avait du aller
s'ancrer la veille dans une autre baie – cette « mésaventure » qui avait
suscité la colère de son commandant, le Capitaine Julien Chauvelon,
sauva le trois-mâts et son équipage...
Le Belem allait sillonner l'Atlantique jusqu'en
1914, effectuant 33 « campagnes » - des voyages qui duraient jusqu'à
six mois - d'abord sous le pavillon Crouan, puis celui de l'armement
Demange, enfin celui des « Armateurs Coloniaux ». Puis, à l'orée d'une
guerre mondiale qui devait entraîner la destruction d'innombrables
voiliers de commerce, le petit Antillais allait quitter la France pour
d'autres rivages, d'autres pavillons, une autre vie.
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