Le 22 juin 1940 est conclu l'armistice entre le IIIe
Reich allemand et les représentants du gouvernement français de Philippe
Pétain.
Se méprenant sur Hitler, le maréchal Pétain croit pouvoir traiter
avec celui-ci comme, soixante-dix ans plus tôt, Adolphe
Thiers négocia avec Bismarck. Dans l'honneur et le respect mutuel.
La réalité sera on ne peut plus différente.
André Larané
HumiliationDésireux de laver l'humiliation de 1918, Hitler exige de signer
l'armistice à Rethondes, en forêt de Compiègne, dans le wagon historique
où le maréchal Foch et les plénipotentiaires allemands se retrouvèrent
pour l'Armistice
du 11 novembre 1918.
Il est entouré du maréchal Hermann Goering, du ministre des
Affaires étrangères Joachim von Ribbentrop, du maréchal Wilhelm Keitel
et du général Alfred Jodl (ce dernier signera à Reims, cinq ans plus
tard, la capitulation
de l'Allemagne). Quelques minutes plus tard arrive la délégation
française, conduite par le général Charles Huntziger, commandant la IIe
Armée de Sedan, et composée d'un amiral, d'un général d'aviation et d'un
civil, LéonNoël, ancienambassadeur en Pologne.
Le maréchal Keitel présente un texte en 24
articles qui exclut toute revendication sur les colonies et sur la
flotte de guerre, pour éviter que colons et marins français n'y trouvent
motif de se rallier aux Britanniques, encore invaincus. Hitler et sa
suite quittent le wagon après la lecture de ce préambule, laissant les
négociateurs entre eux.
Déshonneur Le général Huntziger ne voit dans les conditions d'armistice
«rien
qui soit, directement contraire à l'honneur en particulier pour le
point envisagé».
Weygand s'indigne cependant de l'article 19 qui exige que la
France remette à l'Allemagne
«sur sa demande tous les ressortissants
allemands désignés par le gouvernement du Reich». Il s'agit rien
moins que de trahir la parole donnée aux réfugiés politiques et aux
juifs allemands. Mais Keitel ne veut pas entendre parler de sa
suppression et les Français s'inclinent.
Les Français acceptent également une clause stipulant que leurs
nationaux qui combattraient avec un autre pays contre l'Allemagne
seraient traités en
«francs-tireurs», autrement dit fusillés
sur le champ. Croyant en une conclusion rapide de la guerre, ils
acceptent que les prisonniers ne soient pas rendus à la liberté avant la
signature d'un traité de paix en bonne et due forme.
Résultat : sur 1,8 millions de prisonniers de guerre, 1,6 million
sont envoyés dans le
grand Reich. Au fil du temps, 250.000
seront rapatriés pour des motifs divers et 70.000 s'évaderont. Les
autres, soit plus d'un million, croupiront pendant quatre ans en
Allemagne, généralement employés dans des fermes ou des usines, parfois
internés dans des camps de redressement comme le sinistre Rawa-Ruska.
La convention d'armistice prévoit l'instauration d'une
«zone
libre» au sud du pays. C'est une astuce des Allemands pour
dissuader les dirigeants français d'instaurer un gouvernement en exil et
les garder à sa portée.
Deux jours plus tard, à 19h35, est signé à Rome l'armistice
franco-italien. Au vu des médiocres performances de ses troupes,
Mussolini ne peut obtenir que l'annexion d'une bande de quelques
centaines de mètres à la frontière et la démilitarisation d'une bande de
80 kilomètres en France et en Tunisie.
«The lonely year»
La défection de la France (ainsi que de la Belgique et de la
Pologne) laisse le Royaume-Uni seul face à Hitler. Pendant un an jour
pour jour, du 22 juin 1940 (armistice franco-allemand) au 22 juin 1941 (invasion
de l'URSS par la
Wehrmacht), les Britanniques vont devoir
résister seuls aux attaques allemandes, en ne bénéficiant que de l'aide
matérielle des États-Unis et du soutien en hommes de ses
dominions,
tels le Canada. Cette période héroïque est connue comme
«the lonely
year» (
«l'année solitaire»).
Résistance et collaborationDans les mois qui suivent l'invasion de la France, dans le pays
et à Londres, une poignée seulement de Français songent à préparer la
revanche... Parmi eux surtout des militants chrétiens et des royalistes !
«Faut-il rappeler que, sans parler de De Gaulle, réputé avoir
eu, à certains moments de sa vie, une sympathie pour la monarchie, bon
nombre de combattants de la France libre en ont eu aussi : de Lattre de
Tassigny, Leclerc,
Montsabert, Edmond Michelet étaient royalistes ainsi que l'homme qui a
tiré sur Pierre Laval, Colette ; et celui qui, à Alger, a tué Darlan,
Bonnier de la Chapelle; bien des écrivains qui ont gagné la Résistance
étaient également royalistes : Claude Roy, Debu-Bridel, D. Cordier,
Claude Morgan, mais ils n'ont jamais été regroupés sous cette étiquette» (*). À cette énumération très incomplète de
l'historien Marc Ferro, il faut pour le moins ajouter le nom de Honoré
d'Estienne d'Orves, lieutenant de vaisseau rallié à de
Gaulle dès 1940.
Parmi les Français qui rejoignent le général de Gaulle,
quelques-uns partagent l'opinion de Gilbert Renault, un
Compagnon de
la Libération plus connu sous son nom de guerre :
Colonel Rémy.
Ce grand résistant persistera jusqu'à la Libération à considérer Pétain
et de Gaulle comme les deux facettes complémentaires de la lutte contre
l'occupant, Pétain le
«bouclier», de Gaulle l'
«épée».
La plupart des Français, il est vrai, s'en remettent à Pétain du
soin de les protéger et se laissent endormir par les bonnes manières de
l'occupant allemand, au moins jusqu'à l'entrée en guerre de l'Union
soviétique, un an plus tard. Parmi ces collaborateurs de la première
heure, beaucoup de leaders
issus de la gauche.
La France sous l'Occupation Cliquez pour agrandir
Envahie en six semaines
par les armées hitlériennes, la France se résigne à l'occupation de la
plus grande partie de son territoire.
Par la convention d'armistice du 22 juin 1940, le gouvernement
du Maréchal Pétain, établi à Vichy, se voit reconnaître une autonomie de
façade sur le reste du territoire : c'est la
«zone libre».
Celle-ci est à son tour envahie par la
Wehrmacht le 11
novembre 1942, suite au débarquement anglo-saxon en Afrique du Nord, ce
qui réduit à presque rien les marges de manoeuvre du gouvernement de
Vichy.