Bonjour,
Voilà un sujet délicat qui ne nous concerne pas directement mais les lointaines générations qui vont suivre. Car il ne faut pas se voiler la face, nous avons des déchets ils faut bien en faire quelque chose. Je dirais même que cela devient urgent car la situation sociale et économique mondiale ne présage rien de bon.
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Mégalithes, pyramides, oeuvres architecturales monumentales, ou simple bouche à oreille? Les chercheurs se creusent la tête pour trouver les moyens de transmettre à nos lointains descendants la mémoire des déchets nucléaires.
Pour répondre à cette interrogation vertigineuse - certains déchets peuvent rester radioactifs pendant des dizaines de milliers d'années - une véritable discipline a vu le jour.
Le stockage en couche géologique profonde des déchets "haute activité vie longue", aujourd'hui entreposés en surface, pourrait débuter d'ici une vingtaine d'années dans de nombreux pays: Etats-Unis, Japon, France, ou encore Finlande.
Si différents types de "marqueurs de surface" ont été imaginés, comment s'assurer qu'ils seront correctement interprétés par des générations pour qui nos institutions, nos langues, nos symboles même, n'auront peut-être plus aucun sens?
Pour comprendre les ressorts de la mémoire, et tirer des enseignements des peintures rupestres ou des parchemins égyptiens, les ingénieurs se sont tournés vers d'autres spécialistes: archéologues, anthropologues, historiens, sémiologues, linguistes.
"La nécessité de s'occuper des déchets nucléaires et leur dangerosité potentielle à long terme a donné un élan à la recherche sur la mémoire à long terme", explique Tom Peake de l'Agence de protection de l'environnement (EPA), aux Etats-Unis.
Il s'agit d'abord de prévenir les risques d'intrusion humaine potentiellement dangereuse, mais aussi de permettre de retrouver et d'exhumer ces déchets si les progrès scientifiques permettent un jour de les traiter.
En France, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a travaillé en particulier sur un support papier permanent illustré, dont la durée de vie pourrait aller jusqu'à 1.000 ans, en s'inspirant des enluminures du Moyen-Age. "Si le document doit permettre de repousser les limites de l'oubli, il faut qu'il soit attractif", explique Patrick Charton, responsable du développement durable au sein de l'Andra.
Aux Etats-Unis, sur le site de WIPP (Waste Isolation Pilot Plant), dans l'Etat du Nouveau Mexique, réservé aux déchets d'origine militaire, les chercheurs qui travaillent sur plusieurs milliers d'années envisagent de graver des messages - écrits, symboles et dessins - sur de gigantesques blocs de pierre.
"Nous pensons que fournir de l'information dans différentes langues et en ayant recours à des symboles augmente la probabilité de faire passer le message sur la dangerosité," explique Tom Peake.
Dans cette quête sur la transmission de la mémoire sur des millénaires, toutes les pistes sont explorées, et l'idée selon laquelle les communautés vivant à proximité des sites joueront un rôle clé gagne du terrain.
L'Andra a récemment fait appel à une chercheuse du CNRS pour comprendre l'origine et le mode de transmission des légendes, avec une interrogation: peut-on imaginer qu'une légende puisse naître autour d'un stockage géologique?
"Il ne faut pas créer une installation qui soit totalement coupée de la société. Il faut que la société porte cette mémoire avec elle dans le futur", estime de son côté Claudio Pescatore, de l'Agence de l'OCDE pour l'énergie nucléaire (AEN).
Quel que soit le débat, souvent passionnel, sur l'avenir du nucléaire, ce travail sur la "mémoire plurimillénaire" s'impose d'ores et déjà.
"Même en imaginant qu'on veuille changer de type d'énergie, il faut s'occuper de tous les déchets radioactifs déjà produits et encore à produire par le parc actuel (...) donc la problématique de la mémoire doit être assurée", résume Patrick Charton.